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22 mars 2025 6 22 /03 /mars /2025 23:30

Libre opinion parue dans LA TRIBUNE-Dimanche du 23 mars 2025 :

Le 31 mars prochain sera rendue la décision du tribunal de Paris concernant le procès du Rassemblement national et de ses assistants au Parlement européen pour détournement de fonds publics qui s’est tenu à l’automne 2024.Les réquisitions du parquet proposent notamment, en application de la loi, l’inéligibilité des prévenus, en particulier Marine Le Pen .La décision qui sera prise ne manquera pas de susciter la polémique, le Premier ministre évoquant même une « accusation injuste ».Que faut-il en penser ? 

Les faits. Pendant douze ans, de 2004 à 2016, le Front national-devenu le Rassemblement national- s’est livré volontairement à un détournement des fonds publics européens. Destiné exclusivement au financement de l’activité parlementaire des euros-députés, cet argent public a été détourné, au centime d’euros près, au bénéfice du fonctionnement interne du Front national ainsi qu’à l’enrichissement personnel des proches de la famille Le Pen avec des rémunérations élevées. Après neuf années de procédure contradictoire, les deux mois du procès ont établi « le caractère organisé, optimisé et systématique » de ces détournements. En application de la loi, la procureure a requis des peines sévères contre les prévenus en particulier Madame Le Pen auteure principale de ce détournement, qui risque cinq ans de prison (dont deux fermes), 300 000 euros d’amende et une inéligibilité de cinq ans avec exécution provisoire. 

Le droit. Longtemps facultative, et donc peu appliquée, l’inéligibilité devient, pour les élus, une peine complémentaire obligatoire avec la loi de 2016 contre la corruption , renforcée par la loi de 2017 « pour la confiance dans la vie politique ». Pour des motifs constitutionnels tenant à la nécessaire personnalisation des peines, le juge peut y renoncer à condition de motiver sa décision. Les débats parlementaires montrent une volonté largement partagée de sanctionner sévèrement les manquements à la probité, qualité indissociable de la fonction élective dont le non respect accentue la défiance du peuple envers ses représentants. Tolérer tout manquement à la probité des élus revient à légitimer la déplorable expression « tous pourris ». Mme Le Pen elle-même a multiplié les déclarations en ce sens préconisant dans son ouvrage « Pour que vive la France » (2012) que « l’arme de l’inéligibilité devra être utilisée avec beaucoup plus de rigueur » (page 196).L’inéligibilité des élus permet de réaffirmer que la loi doit être égale pour tous et que le mandat d’élu ne procure aucun privilège devant la justice. C ‘est dire que la phraséologie populiste selon laquelle seul le suffrage populaire peut mettre un terme au mandat électif est fondamentalement anti-républicaine. 

La politique. Devant ce risque d’inéligibilité, Mme Le Pen transforme le procès pénal en procès politique en jouant le rôle de victime d’un soi disant complot visant à l’éliminer de la vie politique, argumentation reprise et développée par ses partisans qui n’hésitent pas à mettre en cause l’impartialité des juges. C’était déjà le cas lors 

d’un précédent procès où des dirigeants du Font national ont été condamnés pour escroquerie et détournement de fonds publics aux élections législatives de 2012, (décision de la Cour de cassation du 19 juin 2024) Alors Mme Le Pen stigmatisait « l’acharnement éminemment suspect du parquet et une instrumentalisation politique de la justice »(Le Monde du 19 juin 2020). 

Quelle issue ? L’inéligibilité est la sanction la mieux adaptée au monde politique où les mandats sont par nature provisoires. Il est triste et affligeant de voir et entendre des élus qui ont manqué à l’exigence de probité indissociable de leur mandat, continuer à parader pendant des mois, en jouant les victimes politiques et niant ainsi le délit majeur que constituent les manquements à la probité. Comme les ressources insuffisantes de la justice, en locaux et personnels, conduisent à reporter au-delà du raisonnable l’application de la peine, ils savent parfaitement utiliser ce délai en leur faveur. Ce comportement recèle tous les ingrédients d’un « trumpisme à la française » et constitue un trouble grave à l’ordre public auquel il convient de mettre un terme en appliquant le droit, rien que le droit, tout le droit. 

Contrairement au malheureux exemple de la justice américaine, la France jusqu’ à ce jour, a évité l’instrumentalisation politique de la justice (à l’exception de la Cour de justice de la République) comme en témoignent les condamnations de deux anciens présidents de la République et de deux anciens Premiers ministres. L’explication est simple : en France les décisions judiciaires reposent exclusivement sur le respect du droit ce qui conforte la démocratie. 

René Dosière. 

Membre honoraire du Parlement 

Président de l’Observatoire de l’éthique publique

 

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Published by René Dosière
21 mai 2024 2 21 /05 /mai /2024 12:52
Pour comprendre les évènements de Calédonie.

Depuis 35 ans –date de mon premier séjour parlementaire en Nouvelle Calédonie- je me préoccupe de l’évolution de ce territoire situé dans le Pacifique sud à 17 000 kms de Paris dont je suis devenu amoureux de ses habitants et de ses paysages et dans lequel j’ai laissé une partie de ma chair. En effet le 5 mai 1998 j’assiste à la signature de l’Accord de Nouméa  depuis mon lit de l’hôpital Gaston Bourret  de Nouméa où je viens d’être opéré d’une quadruple fracture de l’humérus droit, à la suite d’une chute la veille dans l’île de Lifou visitée dans le cadre d’une mission parlementaire. A l’issue de cette cérémonie, Michel Rocard et Lionel Jospin viendront me souhaiter un prompt rétablissement. Quelques mois plus tard je retourne en Calédonie pour préparer le texte de loi sur le statut du territoire dont j’ai été nommé rapporteur à l’Assemblée nationale. Depuis je n’ai cessé de consacrer une bonne partie de mon activité parlementaire à la Calédonie : interventions, entrevues, déplacements, rapports (le dernier en mai 2017 quelques semaines avant de quitter volontairement l’Assemblée nationale.) C’est dire la tristesse profonde et l’effarement que j’éprouve devant les émeutes qui se déroulent en Nouvelle Calédonie. Comment en est-on arrivé là ?

Un processus unique de décolonisation pacifique

Si la  colonisation française s’est généralement terminée dramatiquement (songeons à  l’Indochine et à l’ Algérie.),  en Calédonie où la colonisation a été la plus éprouvante de toutes pour le peuple Kanak, c’est un processus de décolonisation pacifique et apaisée qui s’est mis en mouvement  grâce aux  accords de Matignon (1988) et de Nouméa (1998). Avec ce dernier Accord, Kanak (peuple colonisé) et  colonisateurs (européens) ont reconnu qu’après les ombres et lumières du passé, chacun  avait la même légitimité à vivre en Calédonie pour construire ensemble un destin commun.( comme l’explique  le remarquable préambule de l’Accord qu’il convient de lire pour comprendre la Calédonie )

Ce destin commun, précisé par la loi statutaire de mars 1999,  est conduit par un gouvernement où la collégialité est la règle, puisqu’y siègent indépendantistes et loyalistes (appellation locale des anti-indépendantistes descendants des premiers colons). Depuis 1999, dix sept gouvernements se sont succédés dont seize présidés par des loyalistes. Depuis juillet 2021 le gouvernement est présidé par un Kanak indépendantiste.et  comprend six membres indépendantistes et cinq membres loyalistes. (  L’appellation membre du gouvernement a été préférée à celle de ministre). Il est responsable devant un Congrès aux compétences législatives (une première dans notre histoire politique) dans tous les secteurs dont la responsabilité est du ressort exclusif des calédoniens.( fiscalité, sécurité sociale, éducation, législation du travail, politique économique et environnementale, tourisme, culture, politique minière etc ;) au point que  certains indépendantistes n’hésitent pas à souligner que leur pays est souverain (mais non indépendant) L’ Etat français, représenté par un Haut-Commissaire ne conserve  que les compétences régaliennes (Armée, Sécurité, Justice, Affaires extérieures).Depuis Nouméa, la Calédonie est devenu un pays souverain dont les compétences sont supérieures aux  pays voisins indépendants.  On a parfois le sentiment que certains ont tendance à l’oublier, ce qui leur permet d’ accuser la France quand les difficultés surgissent.

.L’importance du corps électoral.

Compte tenu de cette souveraineté partagée, processus unique dans notre histoire coloniale, les Kanak, ont admis que l’indépendance qu’ils souhaitent (c'est-à-dire la souveraineté pleine et entière) s’obtiendrait par le suffrage populaire et non par la violence. Mais pour que leurs suffrages ne soient pas noyés  par le vote d’arrivants de fraîche date, comme cela s’est déjà  passé dans les années 70.,ils ont demandé et  obtenu dix ans de résidence pour voter aux élections territoriales celles qui permettent de choisir en même temps  les élus des trois provinces (régions) et du Congrès législatif.  Ce corps électoral spécial propre à la Calédonie, a été accepté par les loyalistes dès  1988, puis constitutionnalisé en 1998, puisqu’il déroge à l’universalité du suffrage. A l’occasion de la loi statutaire de 1999, dont j’étais le rapporteur à l’Assemblée,  une condition  supplémentaire a été votée par le législateur (Assemblée et Sénat) : ce corps électoral spécial est gelé à1998.  Tous ceux qui étaient là avant voteront quand ils auront dix ans de résidence (ainsi que leurs enfants quand ils atteindront 18 ans). Ceux qui arrivent après restent exclus. Cette interprétation  est apparue  conforme à l’esprit de l’Accord .Telle ne fut  pas l’opinion du Conseil constitutionnel qui, s’appuyant sur la lettre de l’Accord, annula cette condition. Les Kanak ont considéré  que cette décision remettait en cause l’ensemble de l’Accord et menacé de le rompre. Pour éviter une rupture de l’Accord, le gouvernement de Lionel Jospin déposa aussitôt un projet de loi constitutionnel  rétablissant le « gel »..Ce  nouveau texte fut  voté, par  les deux chambres, à la quasi unanimité en 2000.Il n’entrera pas en vigueur  car il ne pourra être voté au Congrès de Versailles,  la réunion, prévue pour le 20 janvier 2000, ayant été  annulée la veille par  le Président Chirac qui n’était plus assuré d’une majorité constitutionnelle  sur un  autre texte  concernant le statut des magistrats. Toutefois, le Gouvernement assure que ce n’est que partie remise.

Pendant les années suivantes le rétablissement du gel est régulièrement évoqué lors de la réunion annuelle chez le Premier ministre du comité des signataires chargé du suivi de l’Accord. A de nombreuses reprises dans l’hémicycle je rappelle cet engagement de l’Etat  .En réponse  les gouvernements successifs s’engagent à   régler cette question. C’est finalement en 2007, que Jacques Chirac présente un texte reprenant la formulation votée en 2000 qui  rétablit le gel. Il est bien indiqué que cette disposition est provisoire, valable  pour la durée provisoire  de l’Accord de Nouméa. Ce dernier  étant terminé depuis 2021, date de la 3ème consultation, il est nécessaire de réexaminer  la question du corps électoral, car les prochaines élections locales doivent se tenir en mai 2024. Maintenir cette restriction du corps électoral conduirait à ne pas pouvoir voter car le Conseil d’Etat annulerait les élections.  Juridiquement et politiquement le corps électoral doit être modifié .L’Accord de Nouméa précise qu’à son issue il revenait aux trois parties (Etat, indépendantistes, loyalistes) de se réunir et d’envisager ensemble  l’avenir institutionnel de la Calédonie.

Une décision unilatérale de l’Etat

Cette rencontre tripartite ne s’est pas tenue. Pourquoi ? A la  fin de l’Accord, étaient prévues trois consultations référendaires locales afin que les calédoniens se prononcent sur l’indépendance (Pour ces consultations existait un troisième corps électoral spécifique accepté par les partenaires locaux et uniquement réservé à ces consultations) Les deux premières consultations ,en 2018 et en 2020, organisées de façon consensuelle ont rejeté l’indépendance. A l’occasion des campagnes électorales de ces consultations les positions des uns et des autres se sont  radicalisées  au point qu’en 2019 lors des élections provinciales les loyalistes modérés regroupés dans le parti  Calédonie ensemble qui étaient majoritaires ont été balayés au profit des loyalistes radicaux. Le climat pacifié et constructif qui avait régné pendant les années précédentes a commencé à se fissurer. A l’occasion de la troisième consultation en 2021, la rupture est intervenue entre les indépendantistes et l’Etat. En effet la date de cette consultation a été fixée par accord entre l’Etat et les loyalistes malgré l’opposition   des indépendantistes. En conséquence ces derniers ont décidé de ne pas participer au scrutin dont la légitimité politique (et non juridique) est devenue  faible. Les indépendantistes ont alors décidé de ne plus parler avec un Etat qui « passait en force »En outre, six mois plus tard, le Président de la République nomme la présidente loyaliste (et radicale) de la province Sud , secrétaire d’Etat au sein du Gouvernement de la République, ce qui constitue une provocation pour les indépendantistes. A partir de ce moment les discussions entre les partenaires ont été chaotiques, partielles  et jamais tripartites.

Simultanément des modifications sont intervenues à Paris et à Nouméa. En métropole, à la suite du départ d’Edouard Philippe, le dossier calédonien n’est plus suivi par Matignon mais par le ministre de l’Intérieur. Or depuis 1988  les affaires calédoniennes étaient en quelque sorte « le domaine réservé » du Premier ministre, avec une vision globale et interministérielle du dossier. Les successeurs d’E.Philippe s’en sont désintéressés et c’est une faute car les indépendantistes et certains loyalistes tenaient à cette spécificité calédonienne.

En Nouvelle Calédonie les divisions qui s’étaient exprimées aux élections locales de 2019 se sont accentués et cela dans chaque camp. Lors de ces élections, un nouveau parti communautaire fait élire 3 élus au Congrès : ce sont des Wallisiens. Ces trois élus vont fabriquer la majorité du Congrès (26 indépendantistes et 25 loyalistes) d’abord en rejoignant les loyalistes, puis en 2021,les indépendantistes.  Ces derniers sont tellement divisés qu’ils ne parviendront à élire le président du gouvernement qu’après cinq mois de discussions pendant lesquelles c’est le président précédent qui expédie les affaires courantes sans pouvoir prendre de décisions importantes.De ce fait, le budget de la Calédonie ne pourra être voté et sera établi par l’Etat (via la chambre des comptes) ce qui est un  comble pour un pays souverain.  Toutes ces palinodies ne facilitent pas l’élaboration d’un nouveau texte d’avenir et ne permettent pas de prendre les décisions que la situation économique nécessite du fait de sa dégradation alarmante, en particulier dans le domaine du nickel.

 

Un passage en force

Le temps s’écoulant et  la date des élections locales de mai 2024  se rapprochant ,,le ministre Darmanin, faute de pouvoir discuter avec l’ensemble des indépendantistes qui n’ont plus confiance dans l’impartialité de l’Etat, considère qu’il peut passer outre à leur accord d’autant plus qu’il  les soupçonne de vouloir gagner du temps . Une illustration parfaite de la manière différente dont le monde océanien perçoit le temps par rapport au monde occidental. En plus le jeune ministre est pressé de conclure pour assurer la suite de sa carrière politique.

Il fait  d’abord voter le report de ces élections (report autorisé par le Conseil d’Etat jusqu’au plus tard fin 2025) , décision approuvée par le Congrès calédonien et votée sans difficultés par le Parlement. Cependant il limite le report à la fin 2024 alors que le Conseil d’Etat fixe la limite à novembre 2025. Puis il présente un  texte qui modifie la composition du corps électoral pour les élections locales. Cette disposition doit être inscrite dans la constitution car elle maintient une durée de dix ans pour voter  mais renonce au « gel » ce qui rend le corps électoral » glissant. »Ce texte , approuvé par les loyalistes (qui trouvent quand même que dix ans c’est beaucoup) met en colère les indépendantistes dont certains y voient avec une dose de mauvaise foi, une occasion de recoloniser la Calédonie ! La période de discussion parlementaire, d’abord au Sénat en mars puis à l’Assemblée en mai  est mise à profit pour organiser manifestations et défilés de rue. Le 13 avril à Nouméa chaque camp fait défiler ses partisans :30 000 pour las indépendantistes et 25 000 pour les loyalistes .Du jamais vu. Toutes ces manifestations restent pacifiques, mais on constate une montée des violences verbales qui inquiètent tous les experts (au demeurant peu nombreux car les responsables politiques français et plus largement les médias, ne connaissent pas du tout le dossier calédonien). De multiples alertes sont adressées au Gouvernement qui manifestement ne les prend pas en considération. Pire, il commet une ultime provocation en nommant rapporteur du texte à l’Assemblée un nouvel (et jeune) élu calédonien loyaliste radical. Le rapport de ce dernier ,comme je l’ai écrit dans une note précédente, est un brûlot anti-indépendantiste qui renforce la colère des indépendantistes.

Le Parti Union calédonienne(UC) avait en décembre 2023, suscité la création d’une coordination extérieure pour faciliter les manifestations d’opposition. Cette CCAT (cellule de coordination des actions de terrain) regroupe les indépendantistes les plus radicaux qui ne font pas partie du FLNKS et tous ceux qui souhaitaient se joindre aux manifestations et aux barrages. Progressivement les initiatives de cette CCAT échappent au contrôle de ses initiateurs. Finalement au moment  du  vote final de l’Assemblée l’action devient violente : destructions,   pillages et  barrages dans les quartiers Nord de Nouméa , où se concentrent de nombreux  jeunes kanak en situation de précarité souvent consommateurs de drogues et d’alcool. A l’été 2023 en métropole on a connu le même type d’émeutes. Mais en Calédonie la toile de fond et les conséquences sont politiques.

Ces émeutes font maintenant la une de tous les médias .Les commentaires et explications sont à la hauteur de l’ignorance générale de la situation calédonienne par les métropolitains. Dans ce cas il est facile  pour commenter un sujet que l’on ignore, de s’en tenir aux idées reçues et d’évoquer les méfaits de  la colonisation. Je l’ai dit la colonisation en Calédonie fut la plus dure de toutes. Il ne manque pas d’ouvrages, que j’ai lus, sur ce sujet. Un exemple : le premier bachelier kanak date de 1962. C’est dire l’ampleur des efforts à réaliser pour redresser les inégalités. Depuis 1988 les progrès sont considérables, comme j’ai pu le constater à chacun de mes déplacements, en parcourant les deux bilans économiques de l’Accord de Nouméa, en consultant le travaux de l’ISEE de Calédonie .Par contre les mentalités sont plus lentes à décoloniser et cela ne s’effectue pas par décret. Il faut du temps

En 1988 Michel Rocard a su concevoir la paix  entre  des personnes qui se traitaient la veille de terroristes, avec le concours d’une équipe de collaborateurs compétents. En 1998 Lionel Jospin s’inspira de la même méthode pour concevoir, avec l’aide d’experts innovants, cet extraordinaire Accord de Nouméa. Trente six ans plus tard pour surmonter les épreuves actuelles il faudra retrouver l’esprit ,la méthode et les compétences  de  Michel Rocard et Lionel Jospin ce qui implique de renoncer aux attitudes unilatérales et partisanes .Sinon la France perdra la Calédonie comme elle a perdu l’Algérie.

 

 

 

                          René Dosière, Membre honoraire du Parlement, Président de l’Observatoire de l’éthique publique..

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Published by René Dosière
12 mai 2024 7 12 /05 /mai /2024 17:27

Le « rapport » parlementaire du député calédonien Metzdorf concernant la modification du corps électoral en Nouvelle Calédonie vient d’être publié[1].Il précède la discussion d’un texte programmé ce lundi en séance publique.

Son contenu contribue à diminuer l’image de l’Assemblée nationale car il transforme la rigueur et l’autorité habituelles de ce type de document en une brochure électorale de son parti politique (les loyalistes, appellation locale des non-indépendantistes).

La nomination sur ce sujet sensible d’un rapporteur partisan, contrairement à la jurisprudence parlementaire, était pour le moins inopportune et maladroite compte tenu des réactions violentes que suscite ce projet de loi en Nouvelle Calédonie. Le résultat est pire : un brûlot anti-indépendantiste qui réécrit à sa manière l’histoire politique récente.

Je ne prendrais qu’un exemple : ce « rapport » se garde bien d’expliquer pourquoi le corps électoral a été « gelé » en 1998 par décision conforme de l’Assemblée et du Sénat alors même que les motivations figuraient dans mon rapport de 1999 et dans celui du Sénat. Il cite la décision du Conseil constitutionnel qui annule cette interprétation et passe aussitôt à la réforme de 2007 rétablissant ce gel. Mais il oublie de rappeler que deux mois après cette décision du Conseil constitutionnel, le Gouvernement a présenté un texte rétablissant l’interprétation du législateur pour permettre l’application effective des autres dispositions de l’Accord mises en cause par la décision du Conseil.

Ce retour au corps électoral « gelé » sera voté largement en octobre 1999 et même quasi unanimement au Sénat (306 voix pour et 7 contre).Il ne sera pas présenté au Congrès de Versailles, la convocation étant annulée la veille de sa réunion pour des motifs étrangers au sujet calédonien. Ignorant les multiples déclarations formulées depuis cette date par les responsables politiques de droite et de gauche sur la nécessité de revenir à l’esprit de l’Accord de Nouméa, le rapporteur ose présenter la décision du Président Chirac de 2007 comme un acte unilatéral autoritaire! Il ignore les deux rapports parlementaires d’alors (celui présenté par Didier Quentin, député UMP à l’Assemblée nationale le 6 décembre 2006[2] et celui présenté au Sénat, le 10 janvier 2007 par Jean-Jacques Hyest élu UMP[3]) qui argumentent de façon détaillée le retour au corps électoral « gelé » conformément à l’esprit des accords de Matignon (1988) prolongés par l’Accord de Nouméa lesquels ont permis la paix civile en Nouvelle Calédonie depuis trente-cinq ans.

Député pendant cinq législatures, ancien rapporteur du statut de la Nouvelle Calédonie, je considère que ce « rapport » fait honte à l’Assemblée et ne peut que renforcer la colère des Kanak et de tous les artisans de paix. Il est heureux que le Président de la République se soit décidé à retarder la réunion du Congrès et de se saisir de ce dossier si mal engagé.

 

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Published by René Dosière
10 mai 2024 5 10 /05 /mai /2024 13:53

Une synthèse des déclarations que j'ai formulées sur la situation en Nouvelle Calédonie et reprises sur le site internet de l'hebdomadaire du Point  comporte une erreur de date qui rend le texte peu compréhensible.Le texte ci après rétablit l'intégralité de mes déclarations.

Quel est l’objet de ce projet de loi déjà voté par le Sénat et qui sera discuté à l’Assemblée le 13 mai en séance publique?

Il concerne la composition du corps électoral spécial qui s’applique  aux élections territoriales en Nouvelle calédonie . Depuis la signature de l’Accord de Nouméa, en 1998, seuls les citoyens calédoniens ont le droit de vote quand ils remplissent trois conditions cumulatives : être inscrit sur la liste électorale générale (la même qu’en métropole), avoir dix ans de résidence en Calédonie et en outre être inscrit sur le tableau électoral annexe établi cette année 1998. Conséquence : tous ceux arrivés après cette date sont exclus, quelle que soit la durée de leur séjour. Cette disposition a des effets dont l’ampleur a été sous-estimée puisqu’aujourd’hui 43000 personnes soit un cinquième des inscrits de la liste générale ( qui eux participent aux élections nationales) ne peuvent voter pour élire les membres des trois assemblées provinciales et les élus du Congrès alors qu’elles payent impôts et cotisations  sociales calédoniens . C’est ce que l’on nomme le corps électoral « gelé » (sic !) .Le projet gouvernemental procède au « dégel », en  supprimant la référence à 1998 pour les élections à venir, tout en maintenant la condition des dix ans de résidence pour obtenir le droit de vote. Le corps électoral sera « dégelé » (resic !) et deviendra «  glissant » .Conséquence : 25800 personnes nouvelles pourront voter ( Kanak et européens) dont 12441 nées sur le territoire. Resteront exclues 17000 personnes installées depuis moins de dix ans. Ce texte mettra fin à des situations absurdes, comme celle de  ce couple mixte où la femme kanak avait le droit de vote, alors que son époux européen  arrivé depuis 22 ans sur le territoire ne l’avait pas. En outre, comme l’a souligné le Conseil d’Etat, le corps électoral « gelé » est appelé à disparaître au fil du temps (et des décès) faute de se renouveler, car seuls les enfants  (et non les autres parents) peuvent y entrer .Ce dispositif particulier  était toutefois provisoire  car  limité à la durée  de l’Accord de Nouméa . Or ce dernier est terminé depuis 2021comme l’a reconnu le Conseil d’Etat. Depuis cette date, il revient  aux partenaires locaux et à l’Etat d’élaborer un nouvel accord, ce qu’ils ne sont pas parvenus à conclure à ce jour.

Le projet de loi suscite de nombreuses manifestations importantes en Calédonie entre les indépendantistes qui s’opposent au « dégel » et les loyalistes (non indépendantistes) qui le réclament depuis longtemps et considèrent que ce délai de dix ans est encore trop long, alors que notre constitution prévoit que le suffrage est universel ,égal et secret. Pourquoi cette exception en Calédonie ?

En Calédonie, dans les années 1980 on a connu la guerre civile (une centaine de morts)  entre indépendantistes kanak et non indépendantistes européens qui se traitaient réciproquement de  terroristes. Grâce à l’action de Michel Rocard, Premier ministre, la paix a été instaurée en 1988  avec les accords de Matignon-Oudinot. (la fameuse poignée de main entre le leader kanak Jean Marie Tjibaou et le leader loyaliste Jacques Lafleur ). Avec cet accord, les deux camps reconnaissent que l’accès à l’indépendance ne pourra  s’obtenir que de manière pacifique en recourant  au suffrage populaire. Toutefois les Kanak, instruits par leur histoire et les pratiques coloniales passées, demandent l’assurance qu’ils ne seront plus marginalisés par l’arrivée massive de nouveaux électeurs métropolitains, ce qu’ils obtiennent avec  ce  droit de vote réservé aux personnes ayant dix ans de résidence. Cette condition de dix ans est reprise dans l’Accord de Nouméa, et  inscrite dans  un   titre XIII-provisoire- de la Constitution, car elle déroge aux dispositions électorales habituelles.  A l’occasion de l’élaboration de la loi organique de 1999 relative au nouveau statut de la Calédonie issu de l’Accord de Nouméa  j’ai fait prévaloir, comme rapporteur, la notion de « gel » par référence au tableau électoral annexe établi en  1998, en me référant à l’esprit de l’Accord (le Sénat aura la même interprétation). Le Conseil constitutionnel se référant à la lettre, annule ce gel ce qui a conduit  les indépendantistes  à envisager la remise en cause de l’Accord. Il faudra plusieurs années de discussions pour que finalement, en 2007, le président Chirac fasse rétablir cette référence et donc  le « gel » dans la Constitution. A ce moment le consensus de 1998 n’existe plus et le vote est beaucoup plus  partagé, malgré les assurances  du  rapporteur (LR) qui souligne, outre le caractère temporaire de cette disposition, qu’elle ne concernera  qu’un nombre limité de personnes (de l’ordre de 7 à 10% des électeurs). On sait aujourd’hui que la réalité fut différente, puisque ce  nombre concerne 42595 personnes (en 2023) soit  un quart à un cinquième du corps électoral selon les références utilisées. Appliquée  aux élections présidentielles cette proportion réduirait  d’environ dix millions le nombre des électeurs inscrits (48,7 millions en 2022 ).Soyons clairs : organiser aujourd’hui en Calédonie une élection avec le corps électoral actuel devient impossible juridiquement et politiquement car le Conseil constitutionnel annulerait sans aucun doute l’élection ,ce qu’a d’ailleurs laissé entendre le Conseil d’Etat dans son avis. Comme ce dispositif a toujours présenté un caractère transitoire il  est  évident que la réforme s’impose, mais fallait –il procéder unilatéralement ?

Récemment trois anciens Premiers ministre (Ayrault,Vals et Philippe) ont fait part de leur inquiétude concernant le risque d’un  retour éventuel de la violence que l’examen parlementaire de ce texte suscite et ont réclamé au Premier ministre Attal de prendre une initiative. Que faut il en penser ?

Quand je lis les propos  radicaux de certains indépendantistes , selon lesquels ce texte vise à « recoloniser » la Nouvelle calédonie , alors qu’il reprend une revendication ancienne de leur camp, je suis  pour le moins perplexe sur leur rapport à la réalité, d’autant plus que le nombre de personnes qui quittent la Calédonie est plus important que celui des nouveaux arrivants et cela chaque année depuis 2017, un phénomène unique et nouveau dans l’histoire calédonienne.

Quoiqu’il en soit le fait que le dialogue des indépendantistes avec le ministre de l’Intérieur, en charge de ce dossier, est rompu,  souligne  les  erreurs d’analyse du Gouvernement  relatives au contexte   calédonien.

Alors que  depuis la période Rocard, la Nouvelle Calédonie était devenu le « domaine réservé » du Premier ministre, ce n’est plus le cas depuis  le départ d’Edouard Philippe et c’est  une faute car la vision plus globale de Matignon est mieux adaptée aux réalités calédoniennes que la vision politique et sécuritaire du ministère de l’Intérieur. En outre, la séquence terminale de l’Accord de Nouméa, qui comportait trois consultations binaires (oui/non) -avec un autre corps électoral spécifique -(2018,2020,2021) a radicalisé les positions de chaque camp comme on l’a constaté, lors des  dernières élections territoriales de 2019. De plus, la fixation unilatérale de la troisième consultation dans une  période de deuil kanak consécutive au covid a conduit les indépendantistes à s’abstenir massivement ce qui en réduit la légitimité politique (et non juridique). Quelques mois plus tard, la nomination de la présidente loyaliste de la Province Sud comme secrétaire d’Etat du Gouvernement de la République a démontré que l’Etat devenait partisan, ce qui n’est pas l’attitude  adéquate pour négocier des compromis. Le choix d’un député loyaliste calédonien pour rapporter un texte aussi sensible, au mépris de la jurisprudence parlementaire n’est pas de nature à favoriser le consensus local alors même que celui-ci est plus difficile  à réaliser car  la situation politique calédonienne s’est sensiblement  modifiée. Les deux camps politiques opposés, mais unis derrière leurs chefs,  se sont transformés, au fil du temps, en une multitude de partis et de clans où les querelles personnelles et de pouvoir, toujours  plus fortes dans un territoire limité,  l’emportent sur la construction d’un destin commun rendant difficiles, voir politiquement  suicidaires,  les positions raisonnables. De plus, en 2019 la communauté wallisienne  regroupée dans le grand Nouméa a élu trois représentants au Congrès dont les alliances changeantes favorisent des majorités alternatives( actuellement avec les indépendantistes). Cette complexification du paysage politique exige davantage de diplomatie et d’aptitude au dialogue, caractéristiques du palabre océanien .

Enfin  la situation économique du territoire s’est considérablement dégradée ,en particulier  l’industrie du nickel.

On sait  que la Calédonie fait partie des plus importants producteurs de nickel . De plus ce métal est nécessaire pour les batteries des automobiles électriques.  Il apparait  que les usines calédoniennes sont en difficulté . Que se passe t-il ?

La Calédonie s’est construite sur l’industrie du nickel autour de la SLN (Société Le Nickel) qui fut jusqu’aux années 2000 la seule usine métallurgique exploitant un domaine minier important. Dans le cadre de l’ accord de Bercy qui a permis celui de Nouméa , la SLN a été contrainte de vendre à la province Nord, dirigée par les indépendantistes ,un domaine minier qui  a justifié la réalisation , non sans difficultés  de l’usine du Nord marquant ainsi  l’entrée des Kanak dans l’industrie du Nickel. Simultanément la province loyaliste Sud a implanté une usine de traitement du nickel, selon un procédé chimique. Ces trois usines sont en grande difficulté au point que celle du Nord est en arrêt provisoire, qui pourrait être définitif en juillet. Il apparait que dans un marché du nickel spéculatif  la production calédonienne n’est pas compétitive face aux productions indonésienne et chinoise. En outre le nickel calédonien n’est pas adapté pour les batteries sauf à réaliser des investissements coûteux non financés. Le ministre des finances Bruno Lemaire  a mis au point un « plan nickel » qui est loin de satisfaire le Congrès calédonien qui ne l’a toujours pas approuvé. Or l’industrie du nickel emploie un quart des salariés privés du territoire ! Le développement d’un chômage important entrainerait des conséquences financières (charges accrues et recettes en moins) pour le régime social calédonien déjà déficitaire .Plus globalement c’est l’ensemble de l’économie calédonienne qui serait atteinte .alors que  pour faire face à ce qui s’apparenterait à un séisme, la Calédonie n’ a plus de capacités d’emprunt son endettement étant déjà hors normes

La crise économique s’ajoutant  à la crise politique, la situation en Calédonie devient dangereuse . Il est  urgent et nécessaire  que le Premier ministre  Gabriel Attal se saisisse du dossier calédonien , qu’il redonne à  l’Etat  son impartialité  et qu’il prenne les initiatives qui  permettront le retour au dialogue condition de l’élaboration consensuelle d’un nouvel accord qui assure l’avenir de la Nouvelle calédonie.

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Published by René Dosière
7 novembre 2023 2 07 /11 /novembre /2023 15:01

Le rapport annuel consacré aux effectifs des cabinets ministériels qui vient de paraître permet de calculer le coût du Gouvernement. Chaque année je procède à l’analyse de ce document que j’ai actualisé au 1ernovembre car les ministres nommés le 20 juillet dernier n’avaient pu constituer leur cabinet à la date de finalisation du rapport (1er août)

Le coût du gouvernement Borne 2 s’élève à 172,8 millions d’euros, en légère baisse par rapport à l’an dernier (174 millions) mais il comporte deux secrétariats d’Etat en moins, dont le coût est d’environ 3 millions. Il semble bien  que le gouvernement a pris en compte mon analyse de l’an dernier et s’est efforcé de maîtriser l’évolution de son coût.

Contrairement aux idées reçues, ce montant  représente une très faible part de la dépense publique soit 12 centimes d’euros pour 1000 euros de dépense. Mais cette dépense a une valeur symbolique du train de vie de l’exécutif aux yeux des Français.

L’analyse détaillée des rémunérations, à laquelle j’ai procédé, (cf texte joint) montre que des progrès importants sont indispensables pour réduire des inégalités choquantes et substituer la transparence à l’opacité.

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Published by René Dosière
25 octobre 2022 2 25 /10 /octobre /2022 17:30
Le gouvernement d’Elisabeth Borne est le plus féminin et le plus cher de la Vème république.

L’édition 2022 du  document budgétaire « jaune » (du nom de sa couleur) consacré aux Personnels affectés dans les cabinets ministériels vient de paraître. Publié depuis 2007, il recense les effectifs  (et leur rémunération) du gouvernement Borne, à la date du 1er août 2022. Depuis cette date je procède chaque année à une analyse approfondie de ce document  qui figure sur mon  blog. Cette année, étant donnée la date de nomination du gouvernement (le 4 juillet) tous les cabinets n’étaient pas complet trois semaines plus tard. J’ai donc procédé à une actualisation de ce document  sur le site internet du gouvernement à la date du 18 octobre où les effectifs s’élevaient à 565, chiffre que j’ai retenu pour procéder à cette analyse

Avec un montant de 174 millions d’euros, le gouvernement d’Elisabeth Borne se révèle le plus cher des 43 gouvernements de la Vème République en hausse de 4,3% par rapport au gouvernement Castex.

Malgré son importance ce chiffre doit être relativisé : pour 1000 euros de dépenses publiques il compte pour 12 centimes d’euros quand le montant quotidien des intérêts de la dette atteint 144 millions ! Il est vrai qu’il s’agit d’une dépense plus  symbolique qui attire davantage  les regards.

Ce niveau résulte à la fois du nombre de ministres (41 hors Première ministre, contre 42 pour le précédent gouvernement), du nombre de  conseillers ministériels (565 contre 559) ainsi que d’une rémunération brute individuelle plus élevée (8495 euros  mensuels  en moyenne contre 8225 pour le gouvernement Castex soit +3,3%). Il en résulte que l’on peut estimer à environ 20% le nombre de  conseillers qui sont  mieux payés que leur ministre. A noter toutefois : les rémunérations moyennes du cabinet de la Première ministre sont en baisse (9979 contre 10282 l’an dernier soit moins 2,9%).

On relèvera en outre que le cabinet de la Première ministre est le plus féminin desgouvernements de la Vème République avec 43% de femmes (26% chez le Premier ministre précédent).

Aux conseillers ministériels il faut ajouter les personnels supports (huissiers, secrétariat, intendance..) issus des ministères concernés et affectés aux cabinets. Ils sont au nombre de 2257 contre 2234 dans le gouvernement précédent. Au total le gouvernement Borne comprend 2822 personnes (2793  l’an dernier).

Le coût du gouvernement Borne (en millions d’euros.) figure au tableau suivant :

 

Traitement et frais de représentation

Rémunérations des conseillers

Rémunérations du personnel support

Total

Première ministre

2,2

9,3

20,5

32

Gouvernement

10,3

50,2

81,5

142

Total

12,5

59,5

102

174

 

 

 

 

 

 

Malheureusement le document budgétaire est très incomplet car de nombreuses dépenses n’y figurent pas encore. Afin de compléter l’information du Parlement, la Cour des comptes, dans un rapport de mai 2021 consacré aux cabinets ministériels, fait la recommandation suivante : « identifier précisément dans le jaune budgétaire les crédits alloués aux dépenses de fonctionnement et de représentation du cabinet ».Une demande formulée de longue date par l’Observatoire de l’éthique publique que je préside  dans un souci de gestion transparente de l’argent public. La présidence de la République a fini par réaliser cette transparence concernant son propre budget. Un exemple que devrait suivre le Gouvernement.

Vous trouverez ci-dessous une analyse détaillée concernant les effectifs et les rémunérations du Gouvernement Borne.

 

 

 

Effectifs du gouvernement Borne

rémunérations gouvernement Borne

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Published by René Dosière
26 juillet 2022 2 26 /07 /juillet /2022 13:25

Le Journal Officiel du 19 juillet a publié les comptes de campagne des 12 candidats à la dernière élection présidentielle. Ces documents ont été élaborés sous la responsabilité des candidats. Ils vont maintenant être analysés par les experts de la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) qui a l’autorité et les compétences pour vérifier l’exactitude et l’exhaustivité de ces comptes. A l’issue de cet examen, qui ne peut excéder six mois, la CNCCFP rendra son verdict : approbation (avec corrections éventuellement) rejet et fixation du montant du remboursement accordé par l’Etat. Les candidats peuvent faire appel des décisions de la CNCCFP auprès du Conseil Constitutionnel. Même si ces données n’ont pas été validées, il m’a semblé utile de procéder à une analyse comparative en les rapprochant des comptes de 2017.

 En 2022 les candidats à l’élection présidentielle ont été prudents en matière de dépenses qui sont demeurées très nettement en dessous des plafonds fixés par la loi, et cela vaut pour les deux candidats du second tour. On relève d’ailleurs que leurs dépenses sont égales (Macron) ou inférieures (Le Pen) à celles de 2017. Toutefois l’analyse détaillée fait apparaître des modifications dans la conduite de la campagne, notamment en matière de déplacements. Contrairement à ses deux adversaires, Mélenchon a dépensé davantage (+27%) en privilégiant les réunions publiques. Le résultat électoral n’est pas lié au montant des dépenses, comme l’attestent Pécresse et Zemmour. Coté recettes, les dons des particuliers demeurent faibles, sauf pour trois candidats . Quant aux contributions des partis politiques elles ne sont significatives que pour les partis de gouvernement. Quoiqu’il en soit, le remboursement effectué par l’Etat, après vérification des comptes de campagne par la CNCCFP , limite, voire annule, la participation financière  personnelle des candidats. En encadrant les dépenses et recettes autorisées, la législation française favorise l’égalité entre les candidats, indépendamment de leur fortune personnelle à l’opposé du système américain. Mais ce dispositif repose sur le rôle d’une autorité indépendante qui a fait la preuve de son efficacité dans le cadre des compétences qui lui sont attribuées et qui devraient être renforcées. Il appartient aux plus anciens et aux historiens de se remémorer les campagnes passées pour souligner les progrès accomplis qui font de la France une nation exemplaire dans ce domaine des campagnes électorales. On trouvera ci après le détail de cette analyse.

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Published by René Dosière
19 juillet 2022 2 19 /07 /juillet /2022 13:29

Dans son dernier rapport consacré au budget 2021 de l’Elysée, la Cour des comptes revient sur les préconisations formulées l’année  précédente au sujet de la rémunération des 78 gendarmes et policiers affectés au GSPR (groupement de sécurité de la présidence de la république) chargés de la sécurité du Président lorsqu’il se déplace à l’extérieur de l’Elysée. Elle constate qu’elles n’ont pas été suivies d’effet et que les problèmes subsistent ce qui affaiblit le potentiel opérationnel du GSPR. La principale difficulté provient du système indemnitaire particulier de compensation des heures supplémentaires qui est différent pour les gendarmes et les policiers sachant que la disponibilité exigée par leur activité à l’Elysée est déjà compensée par une indemnité de sujétion particulière (ISP) qui s’ajoute à leur traitement de base.

Concernant les gendarmes (au nombre d’une cinquantaine) leur statut militaire qui comporte une disponibilité totale ne permet pas le paiement d’heures supplémentaires, qui sont remplacées par un régime particulier de jours de repos compensateurs. Alors que pour un gendarme de base, la norme est de 45j/an, un gendarme du GSPR cumule, en 2021, 83 jours (57 en 2020 et 61 en 2019). La Cour constate que la réorganisation du dispositif de sécurité qui visait à réduire ce nombre (en 2018, avant la réorganisation, il atteignait 104) n’a pas atteint son objectif.

Les policiers (au nombre d’une trentaine) affectés au GSPR perçoivent des heures supplémentaires selon un régime particulier en vigueur pour la protection des personnalités. En 2021 ce sont 37812 heures supplémentaires qui ont été effectuées, soit par individu un quasi doublement du temps de travail. Ces heures sont payées par le ministère de l’intérieur. Celles qui ne le sont pas, faute de crédits, viennent s’ajouter au « stock » des heures accomplies précédemment et non encore rémunérées. Ce stock s’élève à 236 101 heures ! Il évolue au rythme des campagnes d’indemnisation régulièrement mises en place par le ministère de l’intérieur : en 2019 il s’élevait à 279 667 heures. Il en résulte que les heures supplémentaires des policiers sont payées deux fois : par le budget de l’Elysée via l’ISP et par le budget de l’Etat. En 2020 le ministère avait bien tenté de se faire rembourser par l’Elysée, mais la présidence avait refusé d’honorer la facture au motif que  ce cumul n’est pas prévu par les textes et que les crédits nécessaires figuraient dans le programme budgétaire  police nationale .

La Cour qui a eu la bonne idée de vérifier la suite donnée à ses travaux antérieurs formule un commentaire sans appel. « La mauvaise maîtrise des heures supplémentaires comme des jours de permissions conduit à abaisser le potentiel opérationnel du GSPR. La Cour réitère donc sa préconisation de résoudre le problème structurel de l’organisation du temps de travail avant d’envisager une hausse des effectifs »

Il reste à souhaiter que la commission des finances de l’Assemblée se saisira de cette question dans son prochain rapport sur le budget de l’Elysée et qu’elle nous fournira des éléments d’information complémentaires. 

                                                                       Le 19 juillet 2022.  

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Published by René Dosière
1 juin 2022 3 01 /06 /juin /2022 15:00

Dans le passé, c'est-à-dire avant les années 1990, financer sa candidature aux élections législatives ne posait guère de problèmes aux personnes disposant d’une certaine aisance ou d’un réseau social équivalant capable de fournir des fonds en toute discrétion. Si l’on appartenait à la majorité gouvernementale (la droite jusqu’en 1981 la gauche ensuite) on bénéficiait des fonds secrets du gouvernement. Par le biais des mandats locaux de maire, alors cumulables avec la fonction de député, les entreprises étaient « incitées »à participer au financement en toute illégalité. A l’époque, le code pénal ignorait le financement de la vie politique, ce qui n’incitait pas la justice à faire du zèle. Certains excès sont restés célèbres comme les « campagnes à l’américaine » de Robert Hersant dans les années 1960 et celles de Jean Jacques Servan Schreiber dix ans plus tard. 

Ce temps est révolu. Dans les années 1990 la France s’est dotée d’une législation originale concernant le financement des campagnes électorales. Finies les ressources occultes, place au financement public, établi sur des bases transparentes et égalitaires. Désormais toute personne dépourvue de fortune personnelle peut financer sans (trop de) difficultés sa campagne dont les dépenses sont limitées et vérifiées. On en trouvera ci-dessous la démonstration, établie à partir des travaux de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques concernant les législatives de 2017. Des précisions supplémentaires se trouvent dans mon ouvrage « Argent, morale, politique »(préface de JL Debré) paru aux éditions du seuil .

PAS BESOIN D’ETRE RICHE POUR SE PRESENTER AUX ELECTIONS LEGISLATIVES.

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Published by René Dosière
13 octobre 2021 3 13 /10 /octobre /2021 16:33
Le gouvernement  Castex est le plus cher de la Vème République

160 millions d’euros, tel est le coût, au 1er aout 2021, du gouvernement Castex que j’ai calculé à partir du document budgétaire « jaune » consacré aux personnels des cabinets ministériels qui vient d’être publié (l’an dernier, le document étant incomplet j’avais procédé à une estimation-180 millions-qui s’est révélée trop élevée) Ce montant en fait le gouvernement le plus cher de la Vème République.

Ce coût est lié à la taille du gouvernement, qui comprend 16 ministres de plein exercice, 14 ministres délégués et 12 secrétaires d’État, ce qui le met en 5ème place des gouvernements de la Vème République.

 Les effectifs sont donc  plus nombreux : le nombre des conseillers ministériels  (civils) s’élève – au 1er août 2021 – à 559 alors qu’en 2019 le dernier gouvernement d’Édouard Philippe en comptait 313, soit une hausse de 79%. Il est vrai qu’ultérieurement un décret ministériel a augmenté le nombre de conseillers par ministère, qui avait été réduit de moitié par Édouard Philippe. Dans ces cabinets figurent également des « petites mains » (chauffeurs, secrétaires, huissiers, maître d’hôtels …)  sans lesquelles les cabinets ne pourraient fonctionner. Au total, l’effectif global des cabinets se monte à 2793 personnes. En conséquence la masse des rémunérations augmente également : elle s’élève à 154,2 millions d’euros (hors traitement des ministres) soit 27,5 millions pour le cabinet du Premier ministre, 4,8 millions pour un ministre de plein exercice, 2,2 millions pour un ministre délégué et 1,6 million pour un secrétaire d’État.

Dans cette analyse très fine des cabinets ministériels que l’on peut consulter plus loin je souligne deux aspects nouveaux : Parmi les conseillers, le nombre des contractuels augmente au point de devenir pour la première fois majoritaire (54%). Il s’agit essentiellement de collaborateurs politiques souvent jeunes issus du vivier de la République en marche et des assistants parlementaires. Leur activité se consacre essentiellement aux relations publiques du ministre. Par contre les postes de responsabilité du cabinet sont occupés par des hauts fonctionnaires dont la rémunération est nettement plus élevée.

Alors que la rémunération individuelle moyenne de l’ensemble des conseillers s’élève à 8825 euros bruts mensuels, celle des seuls fonctionnaires monte à 9973 euros (avec les indemnités de sujétions particulières) alors que celle des contractuels est de 7608 euros.

Je souligne également une tendance vertueuse à la baisse des rémunérations individuelles (qui demeurent néanmoins à un niveau élevé) moins 5,9% pour l’ensemble des cabinets.

Le classement des ministères selon la rémunération des seuls fonctionnaires, montre qu’elle est la plus élevée au ministère des Outre-Mer avec 10 997 euros, en hausse de 11,1% par rapport à l’an dernier. En dernière position le cabinet de la ministre de la Mer (7550 euros en baisse de 12% par rapport à l’an dernier). Au total, dans 13 ministères la rémunération individuelle  (des fonctionnaires) diminue, alors que dans 6 autres ministères elle augmente.

Au fil du temps ce document relatif aux cabinets ministériels s’est amélioré. Toutefois ce document reste perfectible. Dans un récent rapport la Cour des comptes formule plusieurs propositions qui rejoignent celles que j’avais précédemment formulées tout comme les membres de l’Observatoire de l’éthique publique.

La Cour considère pour compléter l’information du Parlement qu’il conviendrait d’identifier précisément les crédits alloués aux dépenses de fonctionnement et de représentation du cabinet. J’y ajoute les frais de déplacement et le nombre de véhicules. Tous ces renseignements sont dissimulés dans les budgets ministériels voire cachés aux parlementaires qui n’obtiennent pas toujours de réponse précise et claire à leurs questions écrites.

En outre la Cour des comptes recommande d’établir un référentiel de cotation des postes de cabinet pour déterminer objectivement la rémunération, y compris en matière d’indemnités de sujétions particulières alors que la distribution actuelle s’effectue de manière discrétionnaire, en quelque sorte à la tête de la personne. J’espère vivement que ces recommandations de la Cour seront suivies.

Pour pendre connaissance de l'analyse détaillée, rendez-vous ci-dessous. 

 

 

 

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Published by René Dosière